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Roger Dadoun, Freud.

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Roger Dadoun, Freud.
L'Archipel
31/03/2015

Freud, Roger Dadoun, l’Archipel, Paris, 2015, 572 p, 24.95€

 Ceci n’est pas une biographie… C’est un énorme travail documenté et rigoureux sur l’œuvre de Freud, et surtout sur la constitution de son œuvre, les détours et impasses de la réflexion qui l’ont amené à construire ce monument intellectuel qui régit, encore et malgré tout, notre vie culturelle, la psychanalyse. Il n’en reste pas moins qu’au travers des textes et correspondances, se profilent l’homme, sa vie privée et son intimité. Freud lui-même s’ingéniera à démontrer  cette équation, en se penchant sur les grands hommes tels Moïse ou Michel-Ange, méritants acteurs d’une vie de lutte et d’une lutte pour la vie, qu’il fouille, en archéologue, au travers d’investigations raisonnées et lumineuses.

 Cet ouvrage, au demeurant, une réédition de 1992, est actualisé et augmenté de textes polémiques et critiques sur les néo-freudiens qui ont mis à mal la doxa, ou autres détracteurs récents de Freud, type Michel Onfray, sur lequel il se déchaîne dans un déballage oratoire luxuriant et méprisant. Il épingle au passage l’historienne en titre de la psychanalyse Elisabeth Roudinesco, lui reprochant, à juste titre,  de s’abaisser à polémiquer avec l’auteur de cette littérature, qu’il qualifie de « popcorn », avec un sens de la dérision assez pertinent. On pourrait cependant déplorer les attaques injustes et acerbes contre Françoise Dolto, dont on ne peut réfuter le sens clinique, et Lacan, dont on ne peut passer sous silence l’énorme contribution, inégalée, pratique et théorique, à la clinique des psychoses. Tous deux pionniers, dans leur domaine ne peuvent, en aucun cas, être mis au même niveau qu’un Onfray ; cela ne me paraît pas recevable. Mais passons.

L’auteur que l’on ne présente plus, vu son grand âge et sa riche carrière, remet au goût du jour son ouvrage, avec un vocabulaire modernisé, et un style alerte pétri d’ironie, emprunt humour et de jeux de mots. Sa plume au service de l’écriture de Freud se fait l’écho de la culture et de l’humanisme de celui-ci. 

Il analyse l’œuvre à partir de trois thèmes qui articulent une découpe originale et pertinente :

1900-1914 : la découverte des fondements la sexualité,

1914-1926 : la mort : son cancer de la mâchoire et première guerre mondiale,

1927-1939 : culture, religion, civilisation et humanité.

Cette approche permet de s’y retrouver dans la bibliographie de Freud et de bien cerner l’évolution de ses avancées théoriques. Cet outil de travail vaut tant pour les professionnels que pour les novices désireux d’une approche didactique.

Nous suivons, comme dans un roman, l’élaboration de la théorie de la psychanalyse en passant par sa naissance, jusqu’aux multiples remaniements, restructurations, pétris de doutes et d’angoisses de ce penseur qui, bien qu’adulé et respecté sur le tard, fut largement détracté à ses débuts, et a vécu son parcours dans un registre d’isolement personnel qu’il n’a pas manqué, lui-même, de relever. La solitude du psychanalyste bafoué et rejeté par ses contemporains  n’a ni frontières géographiques, ni limites temporelles… Mais il s’agissait déjà de tenir bon face à l’adversité, en restant campé sur ses positions ; un combat de titan toujours renouvelé. Se déclinent, à la lumière de ces avatars, les polémiques avec ses suiveurs disciples, collègues, opposants, avec lesquels, après l’entente de la complicité amicale, littéraire et expérimentale, viendront les temps de la discorde et des ruptures. Il épingle ceux qui veulent se faire un nom au travers de leurs découvertes, et les désavoue dès qu’ils trahissent la voie étroite, mais royale, qu’il a tracée. Et la liste est longue, et pour cause : Fliess, Stekel, Adler, Rank Jung, Ferenczi…

L’auteur décrit la réalité d’une théorie en marche, de découvertes impensables en ce début de dix-neuvième siècle, règne des tabous et de la mise à l’index de tout discours sur la sexualité, et à fortiori, l’homosexualité. Les bien-pensants et les médecins collet monté tout puissants, qui savent tout sur tout, tiennent déjà solidement le haut du pavé ; aussi, oser introduire, comme boussole, sexualité et pulsion de mort, ne peut que les mettre à mal ! Cela a-t-il un tant soit peu changé ?

Freud, lui, en toute humilité, apprend de ses patients et avance pas à pas, page après page, expérience après expérience, cure après cure, pour constituer ce monument, dans une démarche issue de sa formation de médecin et de chercheur. C’est un Conquistador de terres jamais pénétrées, un maître à penser qui fait la lumière dans l’obscurité, voire l’obscurantisme, capable de remuer les enfers, à défaut de fléchir les Dieux. Un hors la loi, qui  érige en loi, une science subversive, celle de l’inconscient !

Brillant, cultivé, polyglotte, Freud fut un génie inégalé. Il inventa et formalisa la science des rêves, l’auto-analyse, le complexe d’Oedipe le transfert, le mythe de la horde, la pulsion de mort… Rien n’est à en exclure de nos jours, et les opposants à la psychanalyse n’ont pas renoncé à une seule de leurs critiques, signe que la psychanalyse n’a pas pris une ride et qu’elle fait toujours peur. Je reprends les commentaires éloquents de la quatrième de couverture qui présentent un Freud visionnaire, face à la horde sauvage, qui affronta l’inquiétante étrangeté du monde contemporain…

Nous ne sommes, hélas, pas tous Freud…

 Florence Plon

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