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De l’ignorance ou de la folie

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Collectif d'auteurs

mardi 04 septembre 2007

Copie de notre courriel du 16 juillet à 15h 40

Paris, le 16 juillet 2007

« De l’ignorance ou de la folie »

Madame la ministre de la justice, Garde des Sceaux,

Vous avez souhaité et déposé un projet de Loi appelé à renforcer « la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs » . Des professionnels de la question et parmi eux, certains des plus brillants vous ont déjà prévenue : Vous pourriez faire là une grave erreur, car cette Loi aggravera une situation qu’elle prétend combattre.

Alors que ces mêmes professionnels tentaient de vous dire, dans une pétition bien inoffensive, qu’un adolescent n’est pas un adulte, vous répondiez encore avec une légèreté et mauvaise foi, difficilement acceptable, venant d’un haut responsable de la nation. Vous n’avez en fait, pas su répondre aux vraies questions.

Vous nous apprenez que face à la récidive, la fermeté a une « nature structurante ».

D’où tenez-vous cette théorie, Madame la Ministre ?

Comme vous l’a solennellement dit en séance, le sénateur Robert BADINTER, votre prédécesseur, celui-là même qui a mis un terme à l’ultime « fermeté » :

« Ce texte est inutile, implicitement vexant pour la magistrature et plus grave encore, potentiellement dangereux ».

Si la théorie de la fermeté était efficace, croyez-vous que nous, les spécialistes, magistrats, pédopsychiatres, éducateurs, enseignants, depuis des décennies, ne l’aurions pas mise en pratique ? Cet argument populiste, s’il était mis en œuvre, n’aurait comme conséquence que de prolonger la boucle de renforcement négatif que peut avoir construit l’adolescent.

Vous évoquez les « garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion », pour pondérer la décision des juges. Mais plus un jeune dérive ou récidive, plus il est difficile pour lui de se restructurer, face à des réponses « fermes » et il est facile d’imaginer que celui-ci s’en écarte. C’est ce que des décennies de pratique, clinique et éducative, nous ont enseigné.

Au moment de présenter votre projet de Loi, il est évident, comme primat de la pensée de l’action éducative, qu’il convient plus que jamais, de réexaminer toutes les données en présence (dont la qualité des premières réponses et accompagnements).

Il y a de l’ignorance dans ce projet :

  • ignorance totale des phénomènes qui poussent un adolescent à passer à l’acte donc des moyens d’y remédier,
  • ignorance des sciences humaines et de leur lumière,
  • ignorance des données sociologiques et épidémiologiques,
  • ignorance des nombreuses propositions qui ont pourtant été déposées en la matière.

Il y a également de la folie, car vous ne savez où vous nous conduisez tous, et ne pesez pas les graves dommages que provoqueront ces errements absurdes et inutiles.

-2-

Et bien soit, vous aurez votre Loi, si vos députés vous obéissent le doigt sur la couture du pantalon, malgré les vrais doutes que certains d’entre eux ont osé nous avouer. Sachez que le dogme n’est pas de notre côté, notre lecture des choses n’est aucunement partisane, mais qu’elle est œuvre de rigueur et de connaissance, à moins qu’on nous dénie tout compétence ou expérience.

Vous souhaitez briller par un activisme, mais votre manque d’humilité vous empêche d’entendre, au risque de vous couvrir de ridicule.

Des solutions concrètes existent pourtant : reconstruire d’abord un secteur éducatif digne de ce nom, travailler autour du projet remarquable des juges des enfants (AFMJF), lequel redonne place à la victime et célèbre l’échelon local (juridiction de proximité), en développant le principe de réparation/restauration.

Votre projet est sec, pauvre, dangereux, indigne d’un pays respecté pour sa déclaration des Droits de l’Homme.

Mais faîtes-vous partie de ceux qui savent reconnaître leurs erreurs et qui comprennent donc le juste moyen de s’élever ?

Pour construire une maison, le feriez-vous avec vos bras et certitudes ou auriez-vous la géniale idée de solliciter quelques professionnels ?

Docteur Joël DUTERTRE, Médecin en mission locale (Île-de-France)

Jack DROULOUT, Éducateur spécialisé, Directeur d’établissement pour enfants et

adolescents.

Georges RANGASSAMY, Cadre retraité (Marketing-communication)

Ancien pensionnaire de l’éducation surveillée

Membres du COLLECTIF POUR UNE VRAIE PREVENTION DE LA DELINQUANCE DES MINEURS.

Les adolescents ne sont pas des adultes

Présentation :

Un des premiers projets de loi, présenté à l’assemblée nationale dès Juillet 2007, conduit à faire juger les adolescents âgés de 16 à 18 ans, comme des majeurs, en cas de récidive. Ces adolescents seront traités comme des adultes.

Des professionnels de l’enfance, magistrats, avocats, pédopsychiatres, éducateurs, enseignants, spécialistes de la jeunesse lancent un appel pour que soit conduite une évaluation des politiques publiques, en concertation avec tous les acteurs concernés, et que soient attribués des moyens sérieux aux politiques qui permettent l’éducation de ces adolescents.

Merci de me faire connaître si vous signez cet appel, et de me dire quelle qualité vous souhaitez voir accoler à votre nom.

Adresse : http://www.appel-adolescents.org /

Les adolescents ne sont pas des adultes

L’adolescence est l’âge de tous les possibles. C’est aussi l’âge de tous les défis, des prises de risques, de l’entraînement réciproque. Le nombre des suicides, d’accidents de la circulation, de violences subies, et la surconsommation d’alcool ou de drogues sont les signes de la fragilité de cet âge. Une petite minorité s’engage dans la délinquance, parfois avec violence.

Devons nous traiter ces adolescents délinquants comme des adultes, alors qu’aucun débat n’a eu lieu sur l’age de la majorité, et vouloir les envoyer, plus nombreux encore, en prison ?

Cela peut être l’effet du projet de loi présenté par le gouvernement, qui entend faire juger les adolescents âgés de 16 à 18 ans comme des adultes, et durcir les peines de prison, en cas de récidive.

En l’état du texte, par exemple, un vol de portable, commis après deux précédents vols, pourra conduire, sauf exception, un adolescent de 16 ans pendant deux ans en prison, peine plancher minimum. Il en résultera une augmentation importante du nombre d’adolescents détenus.

Aujourd’hui, en France, 15 millions de jeunes poursuivent des études au delà de 20 ans, vivent en couple à 25 ans, ont un premier enfant à 30 ans. La prolongation des études et aussi l’accès difficile à un premier emploi, retardent, pour tous les jeunes, l’entrée dans la vie adulte.

Sur ces 15 millions de jeunes, 15 000 d’entre eux âgés de 16 et 17 ans sont interpellés plusieurs fois dans l’année. La plupart de ces adolescents sont déscolarisés depuis l’age de 14 ans, sans qualification ; ils ne parviennent pas à accéder à un premier emploi. Se percevant comme inutiles, humiliés par les échecs répétés, ils « traînent », provoquent, commettent ensemble la plupart de leurs infractions.

Ce sont ces adolescents qui, seuls, seraient traités comme des adultes ? Ce sont ces adolescents pour lesquels la France abandonnerait tout effort d’éducation ?

Trois mille trois cent cinquante d’entre eux ont été en prison en 2006.

Faire de l’enfermement la seule réponse « automatique » à la délinquance des mineurs est une impasse ; dangereuse pour les adolescents, à cet age de la vie, et inefficace pour la société quand nous connaissons l’importance de la récidive à la sortie de prison.

D’autres sanctions existent, qui fixent des limites, réparent sans exclure, et permettent un nouveau départ.

Nous devons aussi oser nous engager dans la réussite des programmes éducatifs, des internats éducatifs qui structurent ces adolescents, des classes relais, des centres de jour, des maisons des adolescents, qui les inscrivent dans un projet.

Leur efficacité est démontrée. Elle serait encore plus forte si elle était appuyée par des budgets à la hauteur de ces enjeux.

A l’heure de l’ouverture politique et de la modernisation proclamée, nous demandons un moratoire sur le texte en projet, l’ouverture d’un « Grenelle de l’adolescence » pour mener un débat serein sur la délinquance des adolescents, une évaluation des politiques publiques et des réformes législatives successives, pour dégager un consensus sur l’insertion de tous les jeunes.

Conscients de notre responsabilité d’adultes, nous souhaitons que l’adolescence fasse l’objet d’une politique audacieuse de la jeunesse, à la mesure des espoirs et des fragilités dont est porteuse cette période de la vie.

Pétition publiée dans le Nouvel Observateur du 26 juin 2007

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